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Le nez à la fenêtre 

Ce qu’il y a de bien, quand on navigue dans les alizés, c’est qu’il y a toujours plein de bonnes raisons de vivre dehors. Oh, il faut se méfier des morsures du soleil, bien sûr, mais les matières composites qui font le pont d’un bateau rendent la température difficilement supportable à l’intérieur… où, pourtant, il faut bien passer du temps pour récupérer les fichiers météo et faire tourner les routages qui permettent d’affiner la trajectoire. Mais ces fameux fichiers ne disent pas tout, pas plus que la cartographie en temps réel des orages. Or, dans les alizés, des petits phénomènes locaux viennent régulièrement créer de la friture sur la ligne des vents dominants. On avance vent de travers, à 20 nœuds et, d’un coup, sans prévenir… Crac ! Boum ! Huuuuue ! Un grain, gonflé d’eau et de vents contraires. La seule solution pour les anticiper, régler les voiles et leur éviter de claquer fort ? Lever le nez, et regarder la couleur des nuages aux alentours. Ça paraît simple, mais après 12 jours de course, de nuits tronquées, de sommeil sur l’oreille gauche pendant 20 minutes, puis sur l’oreille droite quelques heures plus tard, la vigilance a un coût physique indéniable. Heureusement, la chaleur, les journées qui s’allongent, les lumières de l’aube et du crépuscule donnent bien des raisons de rester éveillé tant que possible. Là, la vitesse joue comme un bon stimulant. 
Ian Lipinski exige des efforts encore à son Class40 Crédit Mutuel, qui glisse moins bien qu’espéré à cause de son carénage de quille abîmé. Son compère Axel Tréhin est revenu fort depuis qu’il a retrouvé 100% du potentiel de son bateau. Les deux marins se sont retrouvés un moment à 10 milles l’un de l’autre. On parie que la VHF a grésillé tandis que Project Rescue Ocean rattrapait puis dépassait Crédit Mutuel. À 910 milles de l’arrivée ce matin, Ian s’accroche, encore et encore. Une première estimation d’arrivée a été faite, qui sera challengée au fil des heures. Crédit Mutuel pourrait être à la Tête à l’Anglais vendredi 25 aux alentours de 12h. Ian ne décrochera sans doute pas la place qu’il espérait, mais boucler une Route du Rhum est une performance qui ne se galvaude pas. Il est salutaire de savoir accepter le sort et de profiter de ce qui est. 

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