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Coucou, c’est nous ! 

Pour faire du bateau, il faut avoir la foi. On parle de cette foi immanente en ses chances de revenir à l’avant alors que les circonstances vous ont fait rétrograder dans les pointages. Elle est encore plus salvatrice quand vous avez tout fait pour passer devant, que vous y êtes parvenu, mais que le vent vous refuse de vous préserver cet avantage acquis et que la course vous intime de chercher une autre solution pour repasser devant. Évidemment, les marins sont rôdés à l’exercice qu’ils ont tour à tour subi ou exploité à leur bénéfice. 

Pour la pratiquer depuis longtemps, Ambrogio Beccaria et Ian Lipinski connaissent la fameuse « loi de la pétole », cette panne de vent qui fige sur l’eau le bateau tandis que les concurrents réussissent à avancer. Repoussé derrière le rideau, l’un grimace. Poussé sous la lumière de l’avant-scène, l’autre a le beau rôle, celui du jeune premier, mais ce n’est pas une raison de fanfaronner : la seule vérité qui compte, c’est celle de la ligne d’arrivée. 

Hier, les éléments ont tourné en faveur de Ian Lipinski. Deuxième de cette mythique Transat CIC, à 66 milles du leader, Ambrogio Beccaria, le skipper du Class40 Crédit Mutuel a grignoté consciencieusement son retard pendant que le solitaire italien se fait prendre dans la zone anticyclonique qui barre la route vers New York. C’était prévisible, encore fallait-il bien exécuter les opérations pour convertir les efforts en performance, l’opportunité en réussite. 

Ce mardi matin, Ian est devant, pour un peu moins de cinq milles, et c’est un acte nouveau qui s’ouvre. La scène n’est pas bien large. Droit devant : la ligne d’arrivée mouillée au large de New York. Dessous : l’immensité de l’Atlantique Nord, qui ne présente pas d’intérêt stratégique dans les circonstances du moment. Au-dessus, la zone de protection cétacés mise en place par l’organisation de course et sa frontière virtuelle infranchissable. Et, tout autour : le vent, dont il faut savoir faire quelque chose. 

Ce matin, le Class40 Crédit Mutuel avance vers cette zone interdite, selon la volonté de son skipper, qui essaie d’exploiter le vent faible dans l’instant, et cherche à se positionner au mieux pour profiter de la bascule de vent qui surviendra en début d’après-midi et qui lui permettra de faire une route plus directe vers New York. Les cartographies météo ne disant pas tout, il se peut que, sur l’eau, la vérité soit un brin différente, mais l’on peut s’attendre à voir Ian pousser son monocoque jusqu’à la frontière avant de virer de bord. Alors, le vent forcira et le tempo accélérera. Il reste moins de 600 milles à parcourir aux marins de tête. 600 milles épiques et beaux à suivre, forcément.